La filière optique doit s’adapter pour lutter contre le non-recours aux soins optiques
La vue est un sens essentiel, d’autant plus pour les personnes âgées du fait qu’elle favorise le maintien de l’autonomie, et contribue directement à une meilleure inclusion et une meilleure qualité de vie de ces derniers.
Le recours aux soins optiques est donc un enjeu très important, dans un contexte où la population vieillit (d’ici à 2030, les 60 ans et plus devraient représenter 20 millions de personnes en France – contre 15 millions à l’heure actuelle). Surtout qu’aujourd’hui, 40 % des plus de 78 ans ne portent pas de lunettes adaptées à leur vue1, et 50 % des personnes examinées sur leurs lieux de vie ont un équipement optique qui n’est pas adapté à leur défaut visuel2. Pourtant, la vue est le 4ᵉ signe “avant-chuteur”3 alors même que le coût des chutes en France représente 2 milliards d’euros4.
Cette thématique était au cœur du 40ᵉ Congrès d’Optométrie et de Contactologie organisé par l’Association des Optométristes de France (AOF) qui s’est tenu il y a quelques semaines. Matthieu Gerber, président et fondateur de la société Les Opticiens Mobiles, a participé à un débat avec les représentants des principaux syndicats de la filière optiques sur le thème “Comment l’opticien doit s’adapter pour lutter contre le non-recours aux soins optiques ?”. Vous pouvez lire sa tribune complète qu’il vient de publier sur Linkedin pour savoir ce qui s’est dit pendant cette conférence. Ici, dans cet article, nous allons en faire un bref résumé.
4 propositions pour faciliter ainsi l’accès à la santé visuelle des personnes fragiles
Un état des lieux des besoins en santé visuelle a été dressé. Avec le vieillissement de la population, ceux-ci sont de plus en plus importants.
Parmi les pistes évoquées pour mieux répondre à cet enjeu, la nécessité de revoir l’organisation des soins et des protocoles de coopération entre les “3.O” (Ophtalmologiste, Orthoptiste et Opticien) a mis tout le monde d’accord.
Le besoin de lever certains freins a également été mis sur la table parmi lesquels la barrière physique. Les ophtalmologistes ne se déplacent pas auprès des personnes dans l’incapacité de se déplacer par manque de temps, du fait d’un agenda saturé, ou l’impossibilité de prendre de nouveaux patients, compliquant d’autant plus l’accès à l’ordonnance optique.
Dans ce contexte, 4 propositions ont été identifiées pour éradiquer le non recours aux soins optiques et faciliter ainsi l’accès à la santé visuelle des personnes fragiles :
1. La réfraction en mobilité dans le strict respect de la confidentialité et des conditions d’hygiène préalablement définies.
2. Un meilleur accès à l’ordonnance en s’appuyant sur la télémédecine et la téléexpertise entre opticiens et médecins ophtalmologistes dans la réalisation d’examens complémentaires réalisés par l’opticien directement sur les lieux de vie puis télétransmis de manière sécurisée et interprétés à distance par un médecin spécialiste (ophtalmologiste). Une délégation de tâches élargie, encadrée par les mêmes protocoles organisationnels existants entre les orthoptistes et les ophtalmologistes.
3. La primo-prescription encadrée pour les opticiens disposant d’un master en pratique avancé en lien avec la réforme de la formation et dans la suite des préconisations de l’IGAS, après réalisation d’un bilan complet et d’examens complémentaires réalisés et télétransmis aux médecins ophtalmologistes.
4. L’intégration du financement des actes de réfraction, examens complémentaires et dépistage réalisés en mobilité ainsi qu’un forfait déplacement pour les opticiens comme c’est le cas pour les infirmiers et autres professionnels de santé qui se déplacent afin d’éviter un reste à charge pour le patient ayant besoin d’une prise en charge à domicile ou dans les établissements médico-sociaux et de santé.
Cela passe par une réforme forte de la filière en santé visuelle, mais c’est le prix à payer pour que celle-ci s’adapte aux évolutions démographiques de la société (pyramide des âges).
Notes et références :
1 Étude de l’Inserm, de l’Université de Bordeaux et de la Sorbonne, 2018.
2 Étude de l’Inserm, de l’Université de Bordeaux et de la Sorbonne, 2018.
3 Plan antichute du ministère des Solidarités et de la Santé, Février 2022.
4 Étude du Pr Dantoine, professeur de médecine interne gériatrie et biologie du vieillissement à la Faculté de Limoges, enseignant-chercheur, chef de service de médecine gériatrique au CHU de Limoges, 2016.